Une mémoire absolue : le quotidien d’une femme parmi les 0,00001 % de la population dotée d’une capacité cérébrale exceptionnelle

Imaginez-vous capable de vous remémorer chaque détail de votre existence, comme si chaque instant était gravé à jamais. Cette faculté prodigieuse, loin d'être un don sans ombre, soulève des questions sur les limites de notre esprit et le poids du souvenir. Découvrez le récit poignant d'une vie où rien ne s'efface.
Quand notre esprit devient une archive vivante
Rebecca Sharrock et Emily Nash partagent une caractéristique exceptionnelle : elles font partie d’un cercle très restreint de personnes au monde vivant avec ce que la science nomme la mémoire autobiographique hautement supérieure, ou HSAM. En clair, elles peuvent se remémorer avec une fidélité impressionnante quasiment chaque journée de leur existence.
Emily compare son esprit à un immense agenda mental. Chaque date s’y présente comme une séquence qu’elle peut revisiter à sa guise. Un 4 juillet 2002 ? Elle est capable de décrire son repas, sa tenue vestimentaire et jusqu’à ce qui a provoqué son sourire ce jour-là.
Se rappeler… jusqu’à ses premiers pas
Oui, c’est bien réel. Emily déclare même se souvenir de l’instant où elle a commencé à marcher. Un épisode qu’elle relate avec une netteté saisissante : ses parents qui la suivent dans la maison, joyeux et émus, alors qu’elle expérimente le bonheur de se déplacer seule. Des instants que la majorité d’entre nous ne connaît qu’à travers des clichés, mais qui, pour elle, demeurent parfaitement intacts dans sa mémoire.
Une capacité aux revers inattendus
Mais derrière cette faculté extraordinaire se dissimule une expérience bien plus complexe. Rebecca, elle aussi pourvue de cette mémoire singulière, évoque même un fardeau psychique. « Je suis souvent absorbée par des réminiscences soudaines, qui peuvent survenir n’importe quand, sans crier gare », avoue-t-elle.
Imaginez revivre un moment douloureux ou angoissant avec la même acuité qu’à l’origine… même des années plus tard. Rebecca précise que lorsqu’un souvenir d’enfance refait surface, ses émotions sont identiques à celles qu’elle éprouvait petite. Déroutant, n’est-ce pas ?
Quand les sentiments ressurgissent à l’improviste
Le plus éprouvant, pour ces femmes, n’est pas tant de se souvenir, mais de revivre. Chaque réminiscence ranime les sentiments initiaux, comme s’ils n’avaient jamais quitté leur esprit. « Ce n’est pas que je ne veux pas tourner la page », explique Rebecca, « c’est que les souvenirs reviennent avec une telle vivacité qu’ils m’envahissent. »
Une réalité mal comprise par l’entourage, et qui peut créer un sentiment de solitude. « On croit que je cultive le négatif, mais je ne contrôle pas ces retours en arrière », souligne-t-elle.
Apprivoiser une mémoire toujours en éveil
Au final, ce que Rebecca et Emily nous dévoilent, c’est une autre manière d’appréhender sa propre histoire. Si beaucoup fantasmeraient sur l’idée de ne rien oublier, elles nous rappellent que l’oubli possède aussi ses vertus. Laisser les souvenirs s’effacer avec le temps, c’est ce qui nous permet d’évoluer, de cicatriser, de mûrir.
Elles doivent composer avec ce flot ininterrompu de mémoires, accueillir ces éclats du passé comme on consulte un album ancien… sans se laisser submerger.